Il Diritto dell'Unione EuropeaEISSN 2465-2474 / ISSN 1125-8551
G. Giappichelli Editore

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L'Union européenne et l'adhésion à la Convention européenne des droits de l'Homme (di Thomas von Danwitz)


The opinion 2/13 of the Court of Justice stating that the agreement on the accession of the EU to the ECHR is not compatible with the Treaties has been widely commented since its publication in December 2014. The first reactions having been rather negative, this paper takes up the debate on the accession of the EU to the ECHR and it provides the insight of a judge of the ECJ on this opinion 2/13. It examines in depth the different concerns identified by the Court regarding the specific characteristics and the autonomy of EU law, Article 344 TFEU, the co-respondent mechanism, the procedure for the prior involvement of the Court and judicial review in CFSP matters and places them in an overall perspective.

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SOMMARIO:

I. Introduction - II. L'objet de la demande soumise à la Cour dans le cadre de l'Avis 2/13 - III. Les principaux enseignements de l'avis 2/13: a) Sur les caractéristiques spécifiques de l'Union et sur l'autonomie du droit de l'Union; b) Sur l'article 344 TFUE; c) Sur le mécanisme du codéfendeur et sur la procédure de l'implication préalable de la Cour; d) Sur le contrôle juridictionnel en matière de PESC - IV. Analyse et évaluation de l'avis 2/13: a) Remarques liminaires; b) Sur le ratio decidendi de la Cour; c) Sur l'autonomie et l'identité de l'ordre juridique de l'Union. d) Que signifie l'échec de l'accord d'adhésion? - V. Conclusion - NOTE


I. Introduction

 L’adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’Homme (ci-après «CEDH») est, de longue date, un des objectifs de la politique de l’Union en matière de droits fondamentaux et de droits de l’Homme. Cet objectif est de toute évidence à la fois raisonnable et souhaitable. Sachant que tout pays qui souhaite devenir membre de l’Union européenne doit avoir, au préalable, adhéré à la CEDH [1], l’adhésion de l’Union européenne elle-même à cette Convention est perçue comme souhaitable en termes de crédibilité politique et comme une évidence du point de vue des droits fondamentaux. Cependant, il convient de distinguer la manière dont l’adhésion de l’Union doit s’opérer et de se demander en particulier si cette adhésion peut suivre les principes élaborés pour l’adhésion d’États. Dans ce contexte, les opinions exprimées par la doctrine sur la blogosphère à propos de la décision négative rendue par la Cour de l’Union européenne dans son avis 2/13 sur le projet d’accord portant adhésion de l’Union européenne à la CEDH [2] paraissent compréhensibles. Ces opinions évoquent un «shock, disbelief and protest» [3], qualifient l’avis de «Christmas bombshell» [4], reprochent même à la Cour d’avoir jugé dans son propre intérêt juridictionnel et recommandent la voie de la «political desobedience» [5]. Indépendamment de l’importance que l’on accorde à la signification de ces déclarations spontanées [6], la polémique à propos de cet avis de la Cour devrait être uniquement fondée sur une analyse de celui-ci et ne devrait pas reposer sur une appréciation subjective ou sur la simple expression d’une opinion. Dans ces conditions, je saisis volontiers l’occasion d’apporter quelques éléments objectifs à la discussion sur l’adhésion de l’Union à la CEDH et en particulier d’expli­quer les raisons pour [continua ..]


II. L'objet de la demande soumise à la Cour dans le cadre de l'Avis 2/13

Etant donné que certaines prises de position laissent entendre que la Cour aurait jugé le projet d’accord négocié par la Commission portant sur l’adhésion de l’Union européenne à la CEDH [7] de manière arbitraire, il est nécessaire d’indiquer les fondements de droit de l’Union qui ont déterminé l’objet du contrôle dans l’avis 2/13. Conformément au libellé de l’art. 218, par. 11, TFUE, la Commission a sollicité l’avis de la Cour sur la compatibilité de l’accord envisagé portant adhésion de l’Union européenne à la CEDH avec le droit primaire. Parmi les dispositions pertinentes du droit de l’Union, telles qu’interpretées par la jurisprudence, la Cour doit tout d’abord prendre en considération les dispositions du Traité consacrée à l’adhé­sion de l’Union à la CEDH. Ainsi, la première phrase de l’art. 6, par. 2, TUE dispose que «l’Union adhère à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales». Cette obligation claire est nuancée par la seconde phrase de l’art. 6, par. 2, TUE en des termes non équivoques selon lesquelles «cette adhésion ne modifie pas les compétences de l’Union telles qu’elles sont définies dans les traités». Le Protocole n° 8 relatif à l’art. 6, par. 2 qui est annexé et fait partie intégrante du Traité [8] précise à plus d’un titre cette disposition. En effet, l’art. 1 de ce Protocole dispose que l’accord relatif à l’adhésion de l’Union à la CEDH «doit refléter la nécessité de préserver les caractéristiques spécifiques de l’Union et du droit de l’Union» [9]. En outre, l’art. 2 de ce Protocole souligne que «l’accord visé à l’article 1 doit garantir que l’adhésion de l’Union n’af­fecte ni les compétences de l’Union ni les attributions de ses institutions». Enfin, l’art. 3 de ce Protocole impose sans [continua ..]


III. Les principaux enseignements de l'avis 2/13: a) Sur les caractéristiques spécifiques de l'Union et sur l'autonomie du droit de l'Union; b) Sur l'article 344 TFUE; c) Sur le mécanisme du codéfendeur et sur la procédure de l'implication préalable de la Cour; d) Sur le contrôle juridictionnel en matière de PESC

Conformément au cadre du contrôle esquissé précédemment, les principaux enseignements tirés de l’avis 2/13 permettent de répondre directement à la question posée à la Cour par la Commission européenne et abordée de manière classique. Il convient de souligner notamment que la Cour indique dès ses considérations liminaires que l’adhésion de l’Union européenne est caractérisée par d’importantes particularités. En effet, depuis l’adoption de la CEDH, seules des entités étatiques pouvaient y être parties, alors que l’Union européenne, en droit international, ne peut pas, en raison de sa nature même, être considérée comme un État [11]. a) Sur les caractéristiques spécifiques de l’Union et sur l’autonomie du droit de l’Union. Sur ce fondement, la Cour rappelle sa jurisprudence classique sur l’autonomie du droit de l’Union selon laquelle l’Union constitue un ordre juridique d’un genre nouveau, ayant une nature qui lui est spécifique, un cadre constitutionnel et des principes fondateurs qui lui sont propres, une structure institutionnelle particulièrement élaborée ainsi qu’un ensemble complet de règles juridiques qui en assurent le fonctionnement, ce qui signifie que l’adhésion à la CEDH ne doit pas affecter les caractéristiques spécifiques de l’Union et de son droit[12]. Cette jurisprudence classique est appliquée ensuite aux spécificités de la protection des droits fondamentaux selon lesquelles ces droits doivent être préservés dans le cadre de la structure et des objectifs de l’Union [13] et doivent être respectés par les États membres lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’Union [14]. La Cour termine ses considérations liminaires par une référence à la procédure du renvoi préjudiciel qualifiée de clé de voute du système juridictionnel de l’Union dans lequel il appartient aux juridictions nationales et à la Cour de garantir la pleine application du droit de l’Union. Ainsi qu’il ressort des nombreuses [continua ..]


IV. Analyse et évaluation de l'avis 2/13: a) Remarques liminaires; b) Sur le ratio decidendi de la Cour; c) Sur l'autonomie et l'identité de l'ordre juridique de l'Union. d) Que signifie l'échec de l'accord d'adhésion?

Il est tout à fait compréhensible que l’avis rendu par l’assemblée plénière de la Cour selon lequel le projet d’accord portant adhésion de l’Union européenne à la CEDH n’est pas compatible avec le droit primaire ait déclenché de la déception et des regrets, puisque cela signifie que l’adhésion qui aurait, selon de nombreux commentateurs, dû avoir eu lieu depuis longtemps, ne peut pas se réaliser et que, dans l’attente de nouveaux développements, c’est le lien informel actuel liant l’UE à la CEDH, mis en œuvre par la Cour lorsqu’elle assure de manière autonome le respect de la CEDH dans le cadre de son examen du respect des droits fondamentaux, qui va perdurer [28]. a) Remarques liminaires. La question pratique de savoir si l’avis 2/13 empêche les citoyens de l’Union de bénéficier d’une amélioration juridique concrète en maintenant le statut quo ou si l’adhésion de l’Union revêt une importance principalement en termes politiques et institutionnels a à peine été évoquée dans les premiers commentaires publiés après le prononcé de l’avis. C’est la déception quant au résultat auquel est parvenue la Cour qui a davantage été reprochée à la Cour et qui a servi de prétexte pour remettre en cause sa légitimité institutionnelle. Alors que les arrêts controversés rendus par des juridictions nationales sont tout au plus mentionnés dans les sermons du dimanche, sont régulièrement considérés par le monde juridique comme une conséquence logique de la séparation des pouvoirs dans un état de droit reposant sur des principes constitutionnels démocratiques[29] et peuvent provoquer un débat sur les limites du développement prétorien du droit [30], les juridictions supranationales sont, quant à elles, automatiquement considérées comme statuant ultra-vires et leur légitimité institutionnelle est mise en doute [31]. Concernant la Cour de justice de l’Union européenne, ces critiques s’inscrivent dans la droite ligne [continua ..]


V. Conclusion

Nonobstant l’ensemble des éléments qui précèdent, je comprends tout à fait qu’un observateur extérieur ou un partisan engagé du système conventionnel estiment insatisfaisante la motivation de l’avis négatif de la Cour selon laquelle la Cour dans l’avis 2/13 est en fin de compte restée fidèle à la ligne de conduite qui a depuis toujours déterminé sa jurisprudence relative à l’au­tonomie de l’ordre juridique de l’Union et en particulier dans ses avis 1/91, 1/00 et 1/09. La Cour a été plus royaliste que le roi dans sa décision? Au vu de la signification politique et vis-à-vis des droits de l’homme de l’adhésion de l’Union à la CEDH, la Cour n’aurait-elle pas mieux fait de fermer les yeux sur les insuffisances de cet accord? Je ne le pense pas. Plus la signification politique et institutionnelle de l’adhésion de l’UE à la CEDH est importante, en particulier pour la CEDH elle-même, moins il est évident de répondre clairement à la question de savoir si et dans quelle mesure cette adhésion révèle effectivement des lacunes dans la protection des droits fondamentaux. Étant donné que la Cour reconnait une portée particulière à la jurisprudence de la Cour EDH dans l’interprétation de la Charte [56] et attache une grande importance à son rôle de protection des droits fondamentaux [57] et cela également vis-à-vis des institutions de l’Union [58], je ne détecte pas un tel danger dans la pratique juridique. En particulier, la jurisprudence récente de la Cour en matière de dépassement de délai dans le cadre de procédures devant le Tribunal de l’Union européenne [59] montre également à quel point la Cour prend au sérieux ce rôle. Dans ce contexte, la décision au cœur de l’avis 2/13 peut être attribuée à la question d’appréciation relativement simple de savoir si la Cour aurait dû accorder une importance décisive aux considérations d’opportunité variées qui ont été soulevées [continua ..]


NOTE